Archipiades et les 7 000 000 de cochongliers , au pays de l'Open Source
/
cauchemar d'informaticien
(Attention ! pour faire bonne mesure ce texte, en lui-même, va tourner au cauchemar ...)

( par Don Quichotte )


neiges d'antan La neige est tombée cette nuit; les SSIIs, l'APEC, l'ANPE, ... , ni personne n'y est pour rien paraît-il, mais par les temps qui courent l'informaticien au chômage n'a plus qu'à compter les flocons en espérant puissamment que se confirme la très sainte Reprise. Avant de m'acharner à nouveau à la production requise de Curriculum Vitae et candidatures magiques, seule activité autorisée pour garder le droit à des ressources de survie, je reprends en mains, en bon cow-boy, la lecture supposée autorisée (aux heures ouvrables) du dernier  «01 informatique», 20/01/2006, page 24 , encart :

« L'open source oui, mais pas question d'adhérer à la communauté »
C'est en relisant donc les chiffres suivants que je comprends mes divagations nocturnes :
« 'Sondage réalisé par e-mail, en collaboration avec l'Afai et Comm'back. 190 entreprises françaises y ont répondu.' :
Question : 'Utilisez-vous des logiciels libres ?' - Réponse : 'OUI : 56,3% / NON : 43,7%'
Question : 'Partagez-vous vos développements internes, en les plaçant sous licence libre ou en publiant le code source ?' - Réponse : 'OUI : 4,2% / NON : 93,8%'
 »

J'ai reposé mon front sur mon magazine sans blog, me prenant à penser,
Et n'ai pas pu me résoudre à poursuivre ... la lecture du commentaire des plans anti-pénurie d'informaticiens.

Bon sang, mais c'est bien sûr, c'est de là que me vient ce rêve de cochongliers !
« Comment il faut calquer la vie et tous ses mots, c'est vous qui le savez, sublimes animaux ! »

Les Rencontres Anti-Mondialisation (RAM) ont ramené sur le tapis, récemment, des discussions sur les OGM et sur les AGM : Animaux Génétiquement Modifiés. On s'y est demandé si ces AGM, genre « chèvre sécrétant de la toile d'araignée », n'étaient pas des Usines, voire des chimères ...
Ou encore : les trucs Génétiquement Modifiés sont-ils moins 'naturels' que les séculaires espèces animales ou végétales, domestiquées et transformées pour nos convenances, et qui constituent la base de notre culture pastorale.
C'est ce qui a du me faire rêver de cochongliers : ces cochons croisés avec des sangliers ( à moins que ce ne soit l'inverse). J'avais entendu d'anciens collègues chasseurs se plaindre d'une disparition inéluctable des authentiques sangliers dans leur région ... Des fainéants de cochons domestiques ont eu l'appel du large, tandis que des sangliers dévoyés ont eu la paresse de s'accommoder des facilités accaparées par la gent rurale. Maintenant qu'ils se sont accouplés, les différences s'estompent de génération en génération, au grand dam des amateurs du sanglier aux truffes, qui comme Obélix n'aiment que les viandes sauvages. De là à imaginer un scénario à la Hitchcock avec des conchongliers à la place des oiseaux ...

« Mais où sont les neiges d'antan ? » nous chantait Georges Brassens
(« Dites moy où, n'en quel pays / Est Flora la belle Romaine, / Archipiades, né Thaïs /Qui fut sa cousine germaine ..)

Eh oui ! Il est loin le temps de Blanche-Neige et les Sept Nains. C'était rafraîchissant, cette pure Neige entourée de 7 petits nains sympathiques et attentionnés. Maintenant, le temps est aux histoires dégénérées, au genre 'gore' , avec des cochongliers (Gorets & Co.). Archipiades était-il ce malheureux Alcipiade qui, en 415, entraîna son parti démocratique Athénien dans une expédition désastreuse en Sicile , et que l'on prenait, au Moyen-âge, pour une femme ? On dira qu'ici c'est la cousine de Blanche-Neige et on l'imaginera oppressée au sein d'une multitude avilie par des désirs chimériques ... Autrefois le conte amenait parfois à prendre le rêve pour la réalité, maintenant ce serait plutôt la réalité que l'on voudrait plier à l'avènement de réelles chimères.

De façon analogue, le phénomène cochonglier risque de menacer la dynamique de l'Open Source, et la vision initiale et désintéressée attribuée à ce formidable mouvement risque bien de fondre comme les neiges d'antan. Comment pourrait-on alors revitaliser un phénomène si avantageux ?
Les Neiges du temps jadis qui portaient le Logiciel Libre étaient avant tout celles et ceux qui le réalisaient eux-mêmes. Aujourd’hui, les cochongliers de l'Open Source sont surtout des commerciaux qui le défendent et le vantent avant tout pour l'intérêt immédiat qu'ils en tirent.
S'ils continuent à voir les vrais passeurs d'enclos comme des sauvages, des utopistes ou des pigeons, ils risquent de ne plus connaître longtemps le goût de la liberté.

♪ Ballade des dames du temps jadis ♫
  Dites moy ou, n'en quel pays
Est Flora la belle Romaine,
Archipiades, né Thaïs
Qui fut sa cousine germaine,
Echo parlant quand bruyt on maine
Dessus rivière ou sus estan
Qui beaulté ot trop plus qu'humaine.
Mais ou sont les neiges d'antan?
Qui beaulté ot trop plus qu'humaine.
Mais ou sont les neiges d'antan?

  ...




Moi, je suis blanc comme Neige !

Gorets & Co

Remarque sur le noir et blanc :
Tout compte fait, il faut dire que le Logiciel Libre a certainement le même magnétisme que le logiciel propriétaire pour attirer à lui les esprits binaires : c'est 0 ou 1, c'est blanc ou c'est noir, on ne veut pas s'embrouiller avec des nuances.  
Notons que les Linuxiens aiment bien le pingoin, blanc et noir, mais pas uniformément gris comme le cochonglier ...
De bonnes âmes, écologistes et puristes,  diront que le côté noir du pigoin, c'est son affiliation à la société privilégiée, voire son penchant pour un élitisme flagrant : la faible proportion des terriens qui peuvent disposer d'un ordinateur témoignerait de cet égoïsme informatique. Certains de ces critiques, binaires eux aussi, par mimétisme sans doute, vont même jusqu'à vouloir le boycott, voire l'anéantissement, de toute technologie moderne....
  Une réponse du 'pingoin', binaire elle aussi, à cette hostilité latente,  pourrait être la suivante :
  - soit il se défend d'être noir : on rappelle la gratuité des licences logicielles, on parle du Simputer, de l'ordinateur à 100 € conçu aux USA pour équiper les populations indiennes défavorisées ...
  - soit il assume sa face sombre :  si la logique devait être de briser tous les ordinateurs pour essayer de devenir tout pur, et blanc comme neige, il faudrait aussi demander aux musiciens de brûler tous les pianos, ... et de ne garder que des pipeaux !
(précision, au cas où : le piano a des touches blanches et noires ... et seule une minorité de riches peut vraiment s'y exercer)
On pourrait par ailleurs se demander si la notion de "Commerce équitable" ne sous-tend pas un à-priori inconscient de "Culture universelle commune de l'Humanité"; mais il faudrait pour cela sortir du mode binaire ... ON devra donc peut-être attendre qu'ON nous mette au point une informatique quantique pour savoir aborder la question ? ...

 Je dirais donc en fait, pour ma part, que "des gouts et des couleurs, on ne discute point", si ce n'est qu'en cette période hivernale,  on peut être plus particulièrement sensible à l'esthétisme d'un décor en noir et blanc.  À noter aussi que le pingoin n'est pas purement noir et blanc; il a aussi un bec jaune. C'est par là qu'il exprime ses propres couleurs, qu'il caquète, jacasse ou palabre, en n'ayant cure de devenir une mascotte idéalisée, chosifiée, froide, guindée, conventionnelle et chimérique, dans un monde qui n'est pas le sien. 
 

Pour une réflexion plus sérieuse, voir :