Présentation de
l'éditeur :
« ... Aujourd'hui, l'explosion des Technologies de l'Information
et de la communication est à l'origine d'une mutation sans
précédent : les marchés laissent la place aux
réseaux, les biens aux services, les vendeurs aux prestataires
et les acheteurs aux utilisateurs .... les nouveaux
géants de l'économie
mondiale ne cherchent plus seulement à nous vendre des produits,
mais à nous faire adhérer à l'
imaginaire de leurs marques,
à nous regrouper en clubs et à nous faire partager des
émotions communes. Et Internet ne fait
qu'accélérer la dématérialisation de
l'économie, obligeant chacun à être
"connecté" s'il veut accéder aux loisirs, à la
culture et au savoir .
Nos existences sont déjà aux mains des
professionnels du marketing qui traquent nos habitudes et nos modes de
vie ... quelle place restera-t-il aux relations humaines et à la
culture ? »
- «... réflexion philosophique sur la
société de communication que symbolise Internet... »
Extraits ( à retrouver pour
les replacer dans le contexte) :
p11 :
« .. Ce sont les concepts, les idées, les images et non
plus les choses, qui ont une vraie valeur dans la nouvelle
économie. Ce sont l'
imagination
et la
créativité
humaines, et non plus le patrimoine matériel qui
incarnent désormais la richesse. Or, il convient de souligner
que
le capital intellectuel
n'obéit guère aux lois de l'échange . Il est
étroitement associé à ses pourvoyeurs, qui
peuvent en louer ou en concéder provisoirement l'
accès
à des tiers
dans des
conditions strictement définies. »
...
« La volatilité et le rythme effréné de la
nouvelle économie rendent parfaitement désuète et
inadéquate la posséssion de grandes quantités de
biens matériels. L'essentiel de l'infrastructure
matérielle du capitalisme contemporain n'a plus besoin
d'être la propriété de ceux qui en font
usage.»
p12 :
« ..Avec l'ère des réseaux, ce sont les
prestataires de services capables d'accumuler la plus grande
quantité de ressources intellectuelles clés qui
commencent à exercer un contrôle sur les conditions dans
lesquelles les usagers peuvent accéder aux idées, aux
connaissances et aux éléments d'expertise les plus
appréciés. »
...
« Pendant la plus grande partie de l'ère industrielle ,
l'important était de vendre des produits, et le service gratuit
au consommateur représenté par la garantie qui
était attachée à ces produits n'était qu'un
argument d vente supplémentaire. Cette relation s'est
aujourd'hui inversée: de plus en plus d'entreprises font
littéralement cadeau de leurs produits aux consommateurs dans
l'espoir de s'attacher leur fidélité à lons terme
en leur fournissant toutes sortes se services . .. »
« ..
la
propriété fonctionne à un rythme beaucoup trop
lent pour la nouvelle économie, qui opère en termes de
nanosecondes »
..
« Avoir, posséder, accumuler n'ont guère de sens
dans un économie où la seule constante est le changement
... »
« .. Et, comme nos institutions politiques et juridiques sont
enracinées dans un système fondé sur le
marché et la propriété,
cette transition impliquera
également de profonds changements dans nos systèmes de
gouvernement »
« .. On peut même penser qu'
un monde structuré autour de
relations fondées sur la logique de l'accès risque de
produire un nouveau type d'être humain »
«.. Nous sommes en train de passer de la
production industrielle
à la
production
culturelle »
(!)
p 14 :
« .. Les secteurs
de pointe du futur reposeront sur la marchandisation de toute une gamme
d'expériences culturelles plutôt que sur les produits et
les services traditionnels fournis par l'industrie »
« Le passage de la production industrielle au capitalisme
culturel entraîne une transition
non moins significative de l'éthique du travail à une
éthique du jeu
... toutes sortes de ressources culturelles, comme les arts, les
fêtes, les mouvements sociaux, les activités spirituelles
et communautaires, et même l'engagement civique, peuvent
être consommées sous forme d'activité
récréative payante . La lutte entre la sphère
culturelle et la sphère marchande pour le controle exercé
sur l'accès à et le contenu des activités ludiques
sera l'un des axes de définition dela nouvelle ère .
»
p 17 :
« Nous sommes de plus en plus amenés à
acheter le temps, l'affection, la disponibilité et la
considération de nos congénères. Nous payons pour
notre éducation et pour nos loisirs ... même le passage du
temps n'est plus gratuit . La vie devient de plus en plus une
marchandise, et il n'y a guère de différence perceptible
entre communication, communion et commerce»
« ... La grande question politique que posent la nouvelle
économie mondiale des réseaux et sa tendance à
promouvoir la transformation de l'expérience culturelle en objet
de consommation marchande, est celle de la
préservation et du
développement durable d'une
diversité
culturelle qui est
le sang
même de la civilisation »
p21 :
« [les jeunes] .. Ils vivent dans un monde de
performance de type théatral plutôt que de
définitions idéologiques et sont enclins à adopter
une éthique de joueurs plutôt que de producteurs ... c'est
le fait d'être connecté qui l'emporte sur tout le reste
... Les individus du XXI° siècle auront sans doute plus
tendance à se percevoir comme des points d'intersection sur des
réseaux d'intérêt commun que comme des agents
autonomes lutant pour leur survie dans un monde de concurrence
darwinienne »
p23 :
« La séparation de l'humanité en deux
sphères d'existence divergentes - ..(barrière
numérique) _ constitue un véritable tournant historique
.... Tel est le schisme fondamental qui déterminera pour une
bonne part les conflits
politiques des
années qui viennent »
p24 :
« Les conceptions classiques de la propriété
et du marché, qui définissent la civilisation
industrielle, sont de moins en moins pertinentes »
p79 :
« .. Ce sont les idées, sous forme de brevets, marques
déposées, droits de reproduction, secrets de fabrication
et
réseaux de
relations qui permettent de définir une
nouvelle forme de pouvoir
économique, celui de superprestataires contrôlant
de vastes réseaux d'usagers . ... Les entreprises qui
réussissent à s"assurer le monopole des idées dans
tel ou tel secteur d'activité sont à même de
contrôler l'intégralité du secteur en question.
Pour atteindre leurs objectifs, elles créent de vastes
réseaux de prestataires et d'usagers qui
obligent leurs
concurrents, tout comme leurs clients et les autres fournisseurs,
à dépendre de leur stock d'idées pour
survivre. »
p125 :
« Course à la gratuité»
« ... Netscape fait cadeau de son logiciel de navigation
sur le Web. Microsoft fait de même avec Internet Explorer. Sun
Microsystem distribue gratuitement le programme Java ..
.. le premier qui arrive à convaincre un nombre
suffisant de consommateurs d'adopter son logiciel établit de
fait un standard pour tout le secteur et peut réaliser de juteux
bénéfices en vendant à ses clients toute sortes de
services et d'extensions.
La distribution gratuite de software est une stratégie
particulièrement efficace pour une entreprise d'informatique car
plus les
usagers qui
travaillent pour les programmes d'un même fournisseur sont
nombreux, plus les avantages sont grands pour chacun d'entre eux et
plus les services potentiels que peut développer ce fournisseur
prennent de la valeur ( => effet réseau)
»
p180 :
«
.. Culture réduite à l'état de
marchandise ..»
p 251 :
[ à rapprocher de Guy Debord : voir ci-après ]
« Dans un monde postmoderne, les récits et les
performances deviennent aussi sinon plus importants que les faits et
les chiffres. L'ère nouvelle chérit la sémiotique-
l'étude des signes et des signifiants - et est aussi
obsédée par les lois de la grammaire et de la
sémantique que les modernes l'étaient par celles de la
physique. Dans le monde universitaire, la recherche scientifique de la
vérité passe au second plan derrière la
quête individuelle et collective du sens. »
p 327 :
« Se centrer sur la production de compétences
économiques et professionnelles, comme la plupart des
établissements scolaires américains l'ont fait jusqu'ici,
c'est mettre la charrue avant les boeufs, estiment les partisans de
l'éducation civique.
Les jeunes ne peuvent pas se contenter d'apprendre ce qui va leur
servir à vendre leur force de travail sur le marché,
c'est là une conception qui n'est pas à la hauteur des
enjeus du XXI° siècle. Elle fabrique des adultes qui
se perçoivent eux-mêmes davantage comme des produits
consommables que comme des êtres humains accomplis et des citoyens
responsables
»
p 330 :
«.. A l'âge de l'accès, la division droite-gauche
est de plus en plus déplacée par une nouvelle dynamique
sociale qui oppose la valeur intrinsèque à la valeur
d'usage des ressources de la société. L'identité
culturelle, au sens le plus profond du terme, est une question de
valeur intrinsèque. Une culture commune n'est jamais un moyen,
mais toujours une fin en soi. ... Quand la culture perd ses points de
repère communautaires et se transforme en distraction
commerciale, la source de sa valeur intrinsèque se tarit
»
«
Sociologie des pratiques culturelles » (édition La
Découverte)
par
Philippe Coulangeon
( chargé de recherches en sociologie au CNRS, membre de
l'Observatoire sociologique du changement à l'IEP de Paris, et
chercheur associé au Laboratoire de sociologie quantitative du
Cres, à l'Insee )
Introduction :
« .. Dans l'ensemble des sociétés
occidentales, le poids des dépenses de consommation de biens et
services culturels dans le budget des ménages s'est fortement
accru depuis le début des années 1960. Situé en
France au 7° rang des 11 postes de la nomenclature des
dépenses des ménages en 1960, le poste "loisirs, culture"
se situait au 4° rang en 2000, devant les dépenses
d'habillement et d'ameublement ....
Quels changements sociaux, quelles recompositions des styles de vie
accompagnent cette progression du pods des dépenses
consacrées à la culture et aux loisirs ? Est-elle
synonyme d'une démocratisation de l'accès à la
culture ? D'une uniformisation des pratiques et des
représentations ? Ou bien plutôt d'une fragmentation des
identités, d'une exacerbation des tensions
et des inégalités
?
.»
« La société du
spectacle » (edition Folio)
par Guy Debord (1931 - 1994 )
p 21 :
« Le caractère fondamentalement tautologique du
spectacle découle de simple fait que ses moyens sont en
même temps son but .»
p 22 :
« la première phase de la domination de l'économie
sur la vie sociale avait entraîné ... une évidente
dégradation de l'
être
en
avoir. La phase
récente de l'occupation totale de la vie sociale par les
résultats accumulés de l'économie conduit à
un
glissement
généralisé de l'avoir au paraître, dont tout "avoir" effectif doit
tirer son prestige immédiat et sa fonction dernière.
»
[ .. nous repensons au "savoir-être" ...]
p 25 :
« C'est la plus vieille spécialisation sociale, la
spécialisation du pouvoir, qui est à la racine du
spectacle. Le spectacle est ainsi une activité
spécialisée qui parle pour l'ensemble des autres. C'est
la représentation diplomatique de la société
hiérarchique devant elle-même, où toute autre
parole est bannie. Le plus moderne y est aussi le plus archaïque.
»
p 23 :
« Le spectacle est l'héritier de toute la faiblesse
du projet philosophique occidental qui fut une compréhension de
l'activité dominée par les catégories du
voir; aussi bien qu'il se
fonde sur l'incessant déploiement de la rationalité
technique précise qui est issue de cette pensée.
Il ne réalise pas la
philosophie, il philosophe la réalité. C'est la
vie concrète de tous qui s'est dégradée en univers
spéculatif.
»
p 24 :
« ... La technique spectaculaire n'a pas dissipé les
nuages religieux où les hommes avaient placé leurs
propres pouvoirs détachés d'eux : elle les a seulement
reliés à une base terrestre. Ainsi c'est la vie la plus
terrestre qui devient opaque et irrespirable. Elle ne rejette
plus dans le ciel, mais elle héberge chez elle sa
récusation absolue, son fallacieux paradis. Le spectacle est la
réalisation technique de l'exil des pouvoirs humains dans un
au-delà; la scission achevée à l'intérieur
de l'homme.
»
« A mesure que la
nécessité se trouve socialement rêvée,
le rêve devient nécessaire. Le spectacle est le mauvais
rêve de la société moderne enchaînée,
qui n'exprime finalement que son désir de dormir. Le spectacle est le gardien de ce
sommeil. »